LA REFORME DE L’ISF

La réforme fiscale présentée la semaine dernière va redistribuer les cartes.
Les assujettis à l’ISF ayant un « petit » patrimoine seront gagnants. Pour les plus fortunés, les situations seront très contrastées.
Comme toute réforme fiscale se voulant neutre budgétairement, l’allégement de l’ISF couplé à la suppression du bouclier fiscal et de tout mécanisme de plafonnement va faire des gagnants et des perdants parmi les 562.000 assujettis à l’impôt sur la fortune et les 19.000 bénéficiaires du bouclier. Avantage politique : il y aura beaucoup plus de gagnants (mais avec des gains pas forcément élevés). Au premier rang desquels les 300.000 ménages disposant d’un patrimoine compris entre 800.000 et 1,3 million d’euros, qui ne paieront plus d’ISF. Aujourd’hui, ils contribuent à hauteur de 320 millions, soit en moyenne un peu plus de 1.000 euros par contribuable. Et seuls 500 d’entre eux bénéficient du bouclier fiscal : sa disparition ne les affectera quasiment pas. Ils ne devraient pas plus être touchés par la hausse des droits de succession (ciblée sur les deux dernières tranches). Pour les autres, la situation est plus complexe.
En raison d’abord de l’effet, difficile à mesurer, de ces changements à venir sur les droits de succession et les donations. Personne ne sait parfaitement l’anticiper. De fait, les donations en franchise d’impôt autorisées tous les six ans depuis 2006 et limitées à une fois tous les dix ans avec la réforme sont mal connues des services de Bercy. Et il est difficile de connaître le montant des héritages qui subiront la hausse des droits de succession (hausse de 5 points des deux dernières tranches du barème).
« Les Echos » ont donc réalisé des simulations des effets de la réforme fiscale, avec la collaboration du conseil en patrimoine Cyrus Conseil, en ne tenant pas compte du prélèvement supplémentaire de près de 1 milliard d’euros que Bercy espère collecter auprès des héritiers. Ces données sont donc à interpréter avec les réserves d’usage. La probable modification à venir du barème de l’ISF PME (qui permet de réduire son impôt) n’a pas non plus été intégrée. Une situation quasi neutre entre 1,3 et 1,5 million d’euros. Avec le nouveau barème de l’ISF, ceux qui détiennent un patrimoine un peu supérieur à 1,3 million d’euros et qui ne disposent plus de la franchise de 800.000 euros actuellement en vigueur risquent d’être légèrement perdants.
A titre d’exemple : pour un patrimoine de 1,35 million, le surcroît d’impôt aurait dû s’élever à 270 euros. Mais le gouvernement prévoit un mécanisme de lissage. Il devrait agir entre 1,3 et 1,5 million d’euros, indique-t-on à Bercy : entre ces deux bornes, le taux d’ISF passera progressivement de 0 % à 0,25 %. Cela devrait annuler la quasi-intégralité des pertes constatées au bas du nouveau barème de l’ISF. Au-delà, les assujettis à l’ISF sont tous gagnants : 480 euros pour un patrimoine de 1,5 million, selon le profil retenu par Cyrus Conseil (voir ci-dessus). Mais attention : parmi les quelque 200.000 assujettis à l’ISF figurant aujourd’hui dans la deuxième tranche (entre 1,31 et 2,57 millions d’euros de patrimoine), on compte environ un millier de bénéficiaires du bouclier fiscal, qui obtiennent une restitution moyenne de près de 6.000 euros. Ceux-là seront très nettement perdants. Une situation très disparate pour les plus hauts patrimoines.
De manière générale, l’allégement du barème sera d’autant plus bénéfique que les ménages sont fortunés. Mais c’est aussi là que l’on trouvera les plus gros perdants ! La dernière tranche de l’ISF est la plus instructive. Le taux est aujourd’hui de 1,8 % pour les patrimoines supérieurs à 16,8 millions, soit quelque 1.600 redevables qui paient 670 millions d’euros d’ISF.
Parmi eux, on compte environ 1.200 bénéficiaires du bouclier fiscal, qui récupèrent à ce titre quelque 440 millions. Certains seront gagnants, d’autres franchement perdants.
Dans notre exemple, un contribuable déclarant 50 millions de patrimoine mais touchant un important bouclier (787.000 euros) va perdre 215.000 euros net avec la réforme : son gain d’ISF (572.000 euros) sera inférieur à la perte liée à la fin du bouclier. Pour les quelques centaines d’assujettis à l’ISF de cette tranche qui ne bénéficiaient pas du bouclier (parce qu’ils déclarent aussi des revenus très élevés), les gains seront en revanche massifs. Deux simulations réalisées pour des contribuables situés juste en dessous de la dernière tranche sont ainsi très éclairantes.
Premier cas : un rentier disposant d’un très haut patrimoine (15 millions d’euros dans cet exemple) et de revenus suffisamment faibles pour prétendre, jusqu’alors, au bouclier fiscal (à hauteur de 150.000 euros). Il va subir un surcroît d’impôt de plus de 30.000 euros. A l’inverse, dans le deuxième cas, un ménage disposant du même patrimoine de 15 millions d’euros, mais avec des revenus trop élevés pour prétendre au bouclier, va bénéficier d’une très forte baisse d’impôt, de l’ordre de 120.000 euros. Tranches intermédiaires d’ISF : une très grande majorité de gagnants Pour les quelque 55.000 assujettis situés aujourd’hui dans les troisième et quatrième tranches d’ISF (entre 2,57 et 7,71 millions de patrimoine), on ne compte aujourd’hui qu’un peu plus de 3.500 bénéficiaires du bouclier fiscal. L’allégement d’ISF va donc faire essentiellement des gagnants, même si un autre effet de seuil important va survenir à 3 millions d’euros de patrimoine (le taux d’ISF passera de 0,25 % à 0,5 %).
Dans notre exemple, un foyer ayant 6 millions de patrimoine, payant aujourd’hui 52.400 euros d’ISF et bénéficiant d’un « petit » bouclier de 7.700 euros, sera gagnant net de la réforme, à hauteur de 14.700 euros (son gain d’ISF, 22.000 euros, étant supérieur à la perte du bouclier). Il faut noter enfin que ces simulations ne prennent pas en compte les nouvelles taxes sur les contribuables s’expatriant et sur les résidences secondaires dans l’Hexagone des étrangers ou des Français partis à l’étranger : elles ne feront que des perdants, mais pour un public différent.

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